En tant que critique de cinéma avec une formation en sociologie et une passion de toujours pour l’exploration des intersections de l’identité, de la culture et de l’art, j’ai trouvé « Dreams In Nightmares » comme un véritable joyau. Le deuxième film de Shatara Michelle Ford n’est pas seulement un film de road trip ; c’est une exploration poétique de ce que signifie être noir, queer et lutter pour l’épanouissement créatif dans l’Amérique contemporaine.
« Dreams In Nightmares » ressemble à première vue à un conte familier : trois compagnons se lancent dans une quête pour retrouver leur quatrième membre, découvrant des vérités cachées sur eux-mêmes en cours de route. Un personnage aspire à l’expérience classique du road trip américain. Cependant, alors que les téléspectateurs se préparent à une histoire qui semble routinière, le deuxième film de Shatara Michelle Ford s’avère bien plus que prévu. Il défie subtilement ces hypothèses pour offrir à la place quelque chose de plus profond et de plus poétique. »
Deux personnes, Denée Benton (professeur d’université) et Sasha Compère (consultante en affaires), toutes deux récemment sans emploi, trouvent du réconfort en compagnie l’une de l’autre alors qu’elles affrontent les défis du chômage. Ils retrouvent leur vieille amie d’université Lauren (Dezi Bing), une poète qui jongle entre différents boulots pour rester à flot, dans une aventure pour retrouver leur compagnon disparu Kel (Mars Storm Rucker). Ce quatuor, formé il y a plus de dix ans à l’université, est lié par une passion commune pour l’art et une aspiration collective à une vie créative. Malgré leurs circonstances diverses – célibataires, engagés dans des relations amoureuses ou confrontées à des partenariats tendus – ils s’identifient tous comme queer, même si le film souligne subtilement cet aspect sans en faire le point central. Leurs vies sont complexes, englobant divers aspects de l’amour et des relations, tandis que leurs identités transcendent les rôles de genre et les orientations sexuelles traditionnelles, reflétant un large spectre de désirs humains.
En tant que cinéphile, je dirais qu’en créant ces personnages, Ford plonge profondément dans les expériences d’être noir et queer dans l’Amérique d’aujourd’hui. Contrairement à certains films qui crient leurs messages politiques ou s’appuient sur des intrigues compliquées, « Dreams in Nightmares » est fondamentalement une pièce politique. Le danger auquel ces personnages sont confrontés n’est pas seulement une intrigue ; cela découle des perceptions sociétales et de la présentation de soi. Pourtant, Ford évite habilement d’en faire un élément narratif artificiel. Au lieu de cela, le film défie les attentes en présentant ses personnages vivant, conversant, mangeant, s’épanouissant, aimant et exprimant leur intimité d’une manière qui semble naturelle et non forcée.
En tant que cinéphile ayant grandi en regardant le cinéma américain et en étant témoin de la représentation souvent stéréotypée des Noirs à l’écran, je trouve que le travail de Ford est une bouffée d’air frais. Leur écriture et leur mise en scène dégagent une abondance de compassion envers chaque personnage, même ceux représentés comme des objets de moquerie bénéficient de moments de grâce. Même si certaines relations peuvent sembler trop idéalistes pour être réalistes, elles servent effectivement de miroirs reflétant le potentiel d’aspiration de ce récit. Les portraits de Ford sont magnanimes mais parfaitement adaptés aux structures familiales et sociétales qui menacent constamment la joie de ces personnages. Pour contrebalancer cet idéalisme, il est essentiel que de tels contrastes existent dans nos récits.
Je suis attiré par le portrait discret mais profond en émotions de Benton dans le film, où ses expressions faciales, bien que rarement émouvantes, en disent long. Pendant une grande partie du temps passé à l’écran, elle est la seule au centre de l’attention, capturant une myriade d’émotions – des appels téléphoniques anxieux aux rencontres coquettes au bar en passant par les moments gênants à table. En tant que Tasha pratique, Compère équilibre magistralement la comédie et le pur désespoir, tandis que Rucker, dans un contraste saisissant, insuffle à Kel – le membre rêveur et volage de notre quatuor – une personnalité vibrante et une présence réconfortante. Même dans un rôle mineur, le personnage de Jasmin Savoy Brown est un tourbillon qui menace de bouleverser la vie de chacun. Malgré son ignorance, Brown livre ses répliques avec précision et humour tumultueux.
Le scénario sincère du film brille encore plus grâce à la brillante cinématographie de Ludovica Isidor, et la mise en scène de Ford surpasse leur travail initial « Test Pattern ». L’échelle est plus large, le rythme plus délibéré mais plus sûr de lui. Ce cinéaste maîtrise clairement son art, obligeant les spectateurs à se synchroniser avec leur rythme. Une musique puissante exprime un sentiment d’urgence, tandis que les mouvements tranquilles de la caméra soulignent les détails complexes de la prise de vue – des techniques prévisibles mais néanmoins percutantes. Moins traditionnellement, des scènes mettant en scène des acteurs regardant droit dans l’objectif et des intermèdes surréalistes créent une atmosphère onirique, faisant de « Dreams in Nightmares » un voyage artistique extraordinaire.
En fin de compte, ce film sert de guide pour mener une vie riche et satisfaisante – remplie de créativité, de talent artistique, d’amitiés solides et de liens familiaux aimants. Même s’il reconnaît qu’une telle vie peut sembler inaccessible ou onirique, il la présente néanmoins comme quelque chose de réalisable grâce à la sincérité. Il peut être difficile de l’imiter dans la réalité, mais le voir se dérouler sur grand écran est vraiment inspirant.
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2024-08-05 20:46